L’industrie audiovisuelle: un investissement payant !

Texte de Jean-Pierre Laurendeau, chargé de cours à l’École des médias de l’UQAM

Vous désirez vous exprimer sur cet important sujet ? Faites nous parvenir vos textes

–

Peu de gens s’en souviennent, mais avant l’échec de la filière batterie de North Volt, il y avait eu sous les libéraux l’échec de la mine Stornoway Diamonds où le Gouvernement a dépensé 700M$ pour une filière diamant qui s’est éteinte au bout de 24 mois.

Ces deux projets industriels ambitieux, avec des gros chiffres et des grosses compagnies, n’auront été qu’un miroir aux alouettes pour les Québécois. Si on additionne l’investissement à ce jour dans North Volt et dans Stornoway Diamonds, on parle de 1 milliard 400 millions de dollars dépensés sur des routes inutiles (Stornoway) et la destruction de milieux humides (North Volt).

Dans les années 80-90, sous le leadership de cinéastes et de producteurs comme Roger Frappier, Jean-Pierre Lefebvre et Jean Chabot entre autres, toute l’industrie de la production audiovisuelle s’est mobilisée pour la création d’un programme de crédits d’impôt et d’une institution, la SODEC.

En soutenant ainsi le développement de la production, le gouvernement récupère, selon les études d’impact économique, au moins l’équivalent des crédits d’impôt attribués à la production » (Jutras 2002). À la suite de l’introduction du programme, l’activité économique de l’industrie audiovisuelle et le nombre de productions ont considérablement augmenté. La qualité et la popularité des productions québécoises, que ce soit pour les séries télévisuelles ou les longs-métrages, s’est accrue significativement à un coût pratiquement nul pour le Gouvernement.

Imaginons que l’argent gaspillé pour North Volt et Stornoway Diamonds avait été investi pour la production audiovisuelle québécoise ? La tête tourne. Tant de programmes de diffusion, de production, de développement de la relève, de préservation du patrimoine audiovisuel seraient alors devenus possibles ! Tant de séries télévisées, de documentaires, de longs-métrages qui auraient vu le jour !

Investir dans la production audiovisuelle est un investissement rentable pour les gouvernements. Sans tenir compte de sa valeur culturelle et sans investissement préalable dans des infrastructures coûteuses, la production audiovisuelle produit des retombés immédiates dans l’économie locale.

Produire un film ou une série télévisée dans une ville est une injection d’argent directe dans l’économie locale. Ça fait travailler tout le monde : les traiteurs, les restaurants, les entreprises de location de voitures et d’équipement, les chauffeurs de taxi, etc. Les emplois en production audiovisuelle, les techniciens, les auteurs, les créateurs et artisans sont des emplois de bonne qualité qui rapportent en impôt aux gouvernements.

La production originale d’œuvres culturelles d’ici aide les auteurs et les producteurs à créer des propriétés intellectuelles qui pourront être exploitées par les ayants-droits pendant des années. La création des Belles sœurs en 1968 est un bon exemple. L’œuvre jugée vulgaire de deux jeunes inconnus, Brassard et Tremblay, est devenue depuis ce temps une propriété intellectuelle qui ne cesse de rapporter et faire des petits.  North Volt et la mine Stornoway Diamonds n’auront pas une telle descendance.

Il faut investir massivement en culture, avec une stratégie structurante pour les entreprises, mais aussi pour les créateurs de contenus. Une activité économique qui a fait ses preuves est à portée de main : développer ici une industrie culturelle et audiovisuelle de classe mondiale.

Investir en production audiovisuelle crée de vrais emplois, qui demandent peu d’investissement en infrastructure et qui rapportent au gouvernement. Cessons de s’aveugler avec des diamants ou des batteries et misons sur notre culture et les talents qui la font vivre.

Jean-Pierre Laurendeau

Mis à jour le 13 août 2025

***